c.benarab.lopez(@)gmail.com représentée par la GALERIE CHLOE SALGADO
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Les œuvres de la plasticienne semblent a priori nous échapper jusqu’à ce que par l’effleurement d’un regard, l’envie ultime d’y venir voir, surgisse une mystérieuse familiarité. Camille Benarab-Lopez convoque dans sa réflexion toutes les formes par lesquelles se manifestent les héritages silencieux, les cicatrices d’un vécu, le fantasme d'un ailleurs. L’artiste renoue aussi avec la forme éditoriale, engageant notamment le dialogue entre textes et images d’archives. Elle explore ainsi dans sa pratique les notions de souvenir et d’oubli, de présence et d’absence, de réalité et de fiction, provoquées par les méandres de la transmission.
Atlele Soltani
Scars/sirens / GALERIE CHLOE SALGADO / Paris
Plateforme de répit / cur.: Elora Weil-Engerer & Mathilda Portoghese / Tour Orion / Montreuil
Fin de la pudeur / Julio artist run space / Paris
Voir venir / cur.: A topos chez Nanoville / Poush / Clichy
Peines perdues / GALERIE CHLOE SALGADO / Paris
Les jour avenir / Salon approche - GALERIE CHLOE SALGADO / Paris
Sources / DNSAP / ENSBA / Paris
Un écart du quotidien / DNAP / ENSBA / Paris
Ceux qui nous gardent / Diplôme de l’ENSAD / Paris
Ce qui s'écoule / duo show avec Anna Ternon / Centre d'art Tignous Montreuil
Komet, supermarché des multiples / cur.: Non-étoile / Tour Orion / Montreuil
Artissima / International fair of contemporary art Torino / GALERIE CHLOE SALGADO / Turin
SIGNIAU / cur. : Margaux Bonopera et Bérénice Lefebvre / DOC! / Paris
Exposition des lauréats de FORTé #4 / Frac Île-de-France (Les réserves) / Romainville
Vivarium / Plateforme / Paris
Exporama / Capsule Galerie / Rennes
Dinos / GALERIE CHLOE SALGADO / Paris
Demain, puis demain, puis demain… / Jeune Création / Fondation Fiminco / Pantin
Fantôme #3 / cur.: Sarah Mercadante et Benoît Blanchard / Maison des Ailleurs / Charleville-Mézières
Bureau d'investigation du sacré / cur.: Jeanne Mercier / Ensad aux Grandes Serres / Pantin
Réunion sur cellulose / GALERIE CHLOE SALGADO / Paris
Biennale de l'image tangible / Julio artist run space / Paris
Host / École des Beaux-Arts / Nantes
À vue d'œil mieux vaut tendre l'oreille / cur. : COHÉRENT + DUUU Radio / Pl. Indira Gandhi / Gennevilliers
Jeune Création 71ème édition / Fondation Fiminco / Romainville
Les persiennes / duo show avec Anna Ternon / Villa Radet, Cité internationale des Arts / Paris
Le regard du temps / Studio Rouchon / cur. : CulturFoundry / Paris
Move on / Manifesta / cur. : Marianne Dollo / Lyon
Image objet - objet image / Atelier Flamme / Montreuil
La photographie à l'épreuve de l'abstraction / Centre photographique d'Île-de-France / P.-Combault
Des temps liés / Duo show avec Côme Clérino / GALERIE CHLOE SALGADO/ Paris
Dix-sept murs et une fenêtre / On/Off galery / cur. : Côme Clérino / Internet
Exposition des nommés, 12ème édition du prix Icart / Espace Christiane Peugeot / Paris
Un joyeux Noël désordonné / Galerie Odile Ouizeman / Paris
Finale / ENSBA / Paris
"absolute lights like baths of golden snow" / Les Grandes Serres / Cur. : Théo-Mario Coppola / Pantin
Last day, new things / Cité internationale des Arts / Cur. : Charlotte Gautier Van Tour / Paris
La règle du jeu / Les Grandes serres / Cur. : Thomas Mustel / Pantin
Wanderer above the sea of fog / Villa Belleville / Cur. : Charlotte Gautier et Marion Flament / Paris
La petite collection / galerie Bertrand Grimont / Curatrice : Florence Lucas / Paris
FOF salon de sérigraphes / DOC / Paris
À perte de vue / Cité internationale des Arts / Curateur : Fabien Léaustic / Paris
La République des Lettres / l’initiative de la Faculdade de Belas Artes de Lisboa / Lisbonne, Paris
La nuit des Idées / Cité internationale des Arts / Curatrice : Sarah Mercadante / Paris
After the big bang / Le Lavoir moderne / Curateur : Théo-Mario Coppolola / Paris
La moindre apparition sera la bienvenue / Galerie des Beaux-Arts / Cur. : C. Benarab-Lopez / Paris
Sur la page abandonnés / Galerie Valérie Delaunay / Curateurs : Editions extensibles / Paris
Lubok 12/ENSBA / Dukan Gallery / Leibzig / Allemagne
Festival des sens de l’art / ENS / Cachan
Cute cube vision / Pavillon des Indes / Curatrice : Mara Fortunatovic / Courbevoie
Biennale de gravure de Sarcelles / Sarcelles
Illumini / Eglise Saint-Etienne / Curateur : Marty de Montereau / Beaugency
Du soir aux matins / Le Bol / Curateurs : Association extensible / Orléans
Iris time/La conquête de l’espace / l’Inlassable galerie / New York / USA
Masquelibros, salon du livre d’artiste / Madrid / Espagne
Résultats d’expérience / Institut Curie / Paris
Micro salon #5 / l’Inlassable galerie / Paris
De la lumière / galerie HCE / Saint-Denis
Sombra viva / Casa de Velázquez / Madrid / Espagne
Lauréats FID / galerie Catherine Putman / Paris
La Recherche / l’Inlassable galerie et Boiler Room / Oslo / Norvège
Micro salon #4 / l’Inlassable galerie / Paris
Art Books / National Taiwan University of Arts / Taipei / Taiwan
Lauréate de la résidence du Centre Tignous d'art contemporain (Montreuil) en duo avec Anna Ternon pour le projet Ce qui s'écoule
Lauréate de la bourse Recherche ADAGP pour le projet Ascendant : fiction
Lauréate de la Fondation des artistes pour le projet Scars/sirens
Lauréate de la bourse FoRTE - Fonds Régional pour les Talents Émergents Île-de-France pour le projet Fin de la pudeur
Soutien du Cnap à la première exposition personnelle en galerie
Sélectionnée pour Jeune Création, 71ème édition
Sélectionnée pour la Biennale de l'image tangible
Sélectionnée pour le prix Host Call
Lauréate du Prix Icart Artistik Rézo
Lauréate du Prix Pierre Gautier Delaye / résidence à la Cité internationale des Arts / Paris
Lauréate de la bourse Initiatives étudiantes de PSL
Nommée pour le Prix Russolo / Annecy, Dublin, Moscou, Berlin, Mexico
Prix Antalis de la Biennale de gravure de Sarcelles
Du soir aux matins / résidence un mois / Éditions extensibles Lestiou (France)
Villa La Brugère / résidence un mois / Arromanches (France)
Casa de Velázquez / résidence deux mois / Madrid (Espagne)
Lauréate du Prix international de dessin contemporain FID 2014
Meta scope / Catalogue d’exposition / Nano ville et a’topos
FoRTÉ #4 / Catalogue des Lauréats / Région Île-de-France
Fantôme trois / Catalogue d'exposition / Benoît Blanchard et Sarah Mercadante / éditions Lord Byron
Six questions / Tique art / publication en ligne
Biennale de l'image tangible #2 / Catalogue d'exposition / Gabrielle Petiau
La photographie à l'épreuve de l'abstraction / Catalogue d'exposition / Frac Rouen Normandie et CPIF
Les mirages / L’observatoire magazine /publication en ligne
Les paradoxes de l'intime / revue Sensibilités / Arlette Farge et Clémentine Vidal-Naquet / éditions Anamosa / paris
Finale / Catalogue des diplômés des Beaux-Arts de Paris
Lubok / édition de lithographies / Leipzig (Alemagne)
Mémoire(s) / Volume magazine n°5, revue d’archi / Ensa Versailles
Diplôme de l'École nationale supérieure des Beaux-Arts
de Paris, atelier Aurélie Pagès
Diplôme de l’École nationale supérieure des Arts décoratifs
de Paris, section Image imprimée, Mention Très bien
Célebrer et construire, la couleur dans l’écriture de Claude Simon, Mémoire d’étude sous la direction de Paul Sztulman,
Félicitations du Jury
échange à la NTUA, National Taiwan University of Arts,
Taipei (Taiwan)
BTS Mode option Textile, EnsAAMA Olivier de Serres (Paris), Félicitations du jury
Licence de Lettres modernes à Censier-Paris III
- exposition personnelle
- Tour Orion, Montreuil
- commissariat de Elora Weil-Engerer et Mathilda
- Portoghese
- installation (30 m2)
- 2023
- © Romain Darnaud
“ C’est un endroit où les cœurs lourds trouveront un court répit, où les âmes fatiguées pourront se reposer un instant. D’un point de vue formel, cette plateforme est un espace de transition, un entre-deux où le temps s’étire et se plie à notre volonté. Tantôt douce retraite sensorielle qui offre un sursis fugace aux tourments de notre réalité, tantôt métamorphose de la blessure en symbole opérant, elle mue selon nos désirs profonds. La cicatrice est motif récurrent, telle une empreinte qui vient briser la linéarité d’une trajectoire. La blessure, qu’elle soit physique, émotionnelle ou spirituelle, est abordée avec une poésie singulière. Ce parcours, de la plaie à la guérison, va au-delà de l'opération pour explorer l'image qui en reste, la manière dont le traumatisme se matérialise à travers les formes et le visible. L’installation de Camille Benarab-Lopez rend notamment visibles les aidant•e•s qui accompagnent les malades confronté•e•s à des pathologies chroniques et évolutives. Les plateformes d’accompagnement et de répit (PFR) offrent un havre de calme et de réconfort à ces personnes dans un dispositif « d’aide aux aidant•e•s », introduisant, avec la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement en 2015, l’idée nouvelle d’un « droit au répit ».
Un bateau transformé en table d’introspection ou une tente qui abrite les instruments d’un chirurgien de l’être : cette plateforme révèle des aspects ambivalents. Elle peut être à la fois ceinture de sécurité, lien protecteur, mais aussi garrot de la dernière chance. Dans cette exploration, l’artiste convoque une palette d’images : des armes et des âmes, des incisions et des éclats, des brisures et de la colère. Elle puise dans des livres de dermatologie et de chirurgie de la main, transformant l’abjection en protection : cet espace de cicatrisation est aussi un espace béni. Des notions plus tangibles, comme le gras, le lit, l’eau, s’entrelacent avec des outils agricoles, tissant des liens entre la terre nourricière et la régénération. Tel un psychopompe guidant les âmes, l’artiste nous invite à embarquer sur sa barque de Charon, à traverser les méandres de nos blessures pour atteindre un rivage apaisé.“
Elora Weill-Engerer et Mathilda Portoghese
Scars/sirens
- exposition personnelle
- GALERIE CHLOE SALGADO, Paris
- avec le soutien de la Fondation des Artistes
- et de l’Adagp
- enseignes lumineuses réalisées avec Iris Yolal
- 2024
- © Grégory Copitet
L’exposition Scars/Sirens prend pour point de départ un livre de Joyce Caroll Oates, Nous étions les Mulvaney (1996), et un séjour réalisé par Camille Benarab-Lopez dans l’État de New York, retraçant le parcours fictif de cette famille typiquement américaine. Dans le roman, les Mulvaney forment une famille idéale et apparemment soudée, attachée à la terre autant qu’aux apparences de bonheur qu’ils exhalent. Mais le récit est celui d’une chute sociale qui s’effectue à l’extérieur et à l’intérieur même de la cellule familiale : les liens se fissurent et s’écartèlent en une plaie qu’aucun baume ne peut cicatriser. À la fois terribles et formidables, les Mulvaney sont dépeints dans toute leur complexité psychologique, tâchant de se maintenir dans une Amérique marquée par la tyrannie du paraitre. Le sens propre se confond rapidement avec le sens figuré : Oates - également l’autrice d’un autre ouvrage intitulé Les Chutes - donne comme théâtre du drame une région constellée par des chutes d’eau mythiques : des chutes d’Ithaca à celles, fameuses, du Niagara. La vie suit son cours tranquille jusqu’à ce qu’un fort dénivelé produise une descente abrupte, autrement dit une cataracte, terme qui désigne une opacification qui brouille à la fois l’eau ou le cristallin de l’œil. Au bruit de la cascade fait écho la détérioration de la vue. De plus, le radical cata- indique un mouvement vers le bas, comme celui des sirènes décrites par la mythologie grecque, créatures mi-humaines mi-animales dont le charme extérieur attire les marins vers les profondeurs et leur perte. L’ombre de ce mythe plane au-dessus du traumatisme familial : c’est le sentiment d’engloutissement qui prime.
Comme elle l’opère régulièrement dans son travail, Camille Benarab-Lopez entremêle une recherche sur la blessure sociale, une attention aux récits collectés et un fort intérêt pour le signe sous toutes ses formes. L’exposition est chapitrée sur le modèle d’un texte en trois parties, chacune introduite par une enseigne lumineuse : « Falls », « Scars », et « Sirens ». Ces signes peuvent être des stigmates de douleur, mais aussi des trophées de guerre ou des emblèmes de courage et d’amour. Ils peuvent également constituer les jalons d’une structure narrative pour une histoire qui finit toujours par marquer les personnes d’un sceau indélébile : la chute (« Falls ») puis la blessure qui lui survit (« Scars »), enfin l’appel d’un autre horizon (« Sirens »),
Pile de documents épars, inscriptions gravées sur des paysages vaporeux, mains nouant des nœuds, graphèmes issus d’un alphabet rare, blessures bordées de fleurs : Le réel et la fiction ne s’opposent pas de manière dichotomique mais se fondent dans un ensemble complexe de symboles. L’album de famille, avec son lot de non-dits et de secrets, se donne par énigmes visuelles comme pour rappeler que l’image du souvenir compte plus que le souvenir lui-même. En d’autres termes, les relations sont aussi affectives et imaginaires et nous réalisons, sans le savoir, les projets d’autres vies que la nôtre. Au début du roman, Judd, le benjamin des Mulvaney, évoque en effet par ces mots un évènement familial qui s’est déroulé à une date précédent sa naissance « Aujourd’hui encore, je jurerais que j’étais là ».
Elora Weill-Engerer
équations
- briser + chemin
- = fleurir
- série de scans
- avec objets, céramiques, fleurs, images, rubans...
- 2024 -
Fin de la pudeur
je me suis dit
les traîtres, le couteau,
le coupe-papier (les lettres, le livre)
je me suis dit
travailler avec ses mains
(mais de quelles façons)
je me suis dit
outils
> outils agricoles
puis couteau suisse
et le couteau suisse >
on dirait des fleurs
(les cicatrices aussi,
on dirait des fleurs)
et en voulant écrire fleurs
j’ai écrit fêlures
projet lauréat de la Bourse Forté - Région Île-de-France
exposé au Frac Île-de-France (Les Réserves), Aubervilliers
et Chez Julio artist run space, Paris
2022
édition :
Livre de 48 pages
28 x 40,5 cm, édité à 100 exemplaires numérotés
Imprimé en offset chez Snel (Belgique) + une carte imprimée en risographie par Quintal
avec un texte de Atlele Soltani
© Grégory Copitet
Fin de la pudeur est un dispositif visuel autour du peu d’archives familiales : comme beaucoup de communautés d’origine pauvre et paysanne, et issues de l’immigration, l’artiste dispose d’une généalogie presque sans traces.
Au décès de sa grand-mère kabyle, elle récupère une boîte avec quelques photographies et négatifs. Elle y découvre les années de jeunesse de son père passées en banlieue parisienne, de 1963 à 1985.
Elle qui s’empare habituellement d'images aux sources lointaines pour mieux les absorber et en faire son matériau de création, décide alors de travailler à partir de ces images familiales. Fin de la pudeur est donc une confrontation originale entre son histoire personnelle et l’utilisation d’images d’autrui. C’est un défi qu’elle se lance : comment travailler des images chargées d’affects et d'émotions, de liens directs et non esquivables ? Quelles responsabillités cela engage-t-il ? La question des vœux, des secrets, des traces, des manques et des mirages apparaît en filigrane.
Après une déambulation graphique autour de cette collection humbr, et à partir d’entretiens menés avec ses proches, le projet prend la forme de deux expositions, une collective et une autre personnelle, et d’une édition.
Catalogue de l’exposition des lauréat.es
au Frac Île-de-France
Peines perdues
- exposition personnelle
- GALERIE CHLOE SALGADO, Paris
- avec le soutien du CNAP
- 2021
C’est un truisme : nous vivons dans un monde saturé d’images. À quoi bon, alors, en rajouter ? Dans ce supermarché des images, Camille Benarab-Lopez est une glaneuse : à coup de captures d’écran, photocopies et scans aux flous assumés, elle récupère au fil de ses pérégrinations curieuses sur Internet et dans les bibliothèques les représentations des autres. Bouts de photographies, coins de peintures, elle exhume détails et vies minuscules dans de nouvelles matières, et les images rendues plastiques se font sculptures. Jouant de leurs textures, celles-ci s’offrent comme des textes à déchiffrer et des vanités renouvelées : les fleurs se joignent aux coquillages, les archives familiales s’impriment sur des catalogues publicitaires version seventies, ou s’enfouissent, hantises, sous d’obscures tableaux baroques. Matériaux composites et anachronismes féconds se rencontrent alors ad hoc avec une malice surréaliste.
(...)
À cette obsession du rangement répond le goût du secret ; son parfum émane de l’aura nébuleuse des œuvres que le regardeur est invité à découvrir, quitte à se pencher. L’artiste dispose ses menus trésors, attise notre curiosité, tisse le disparate pour y faire apparaître quelques indices, tel ce mot écrit par sa grand-mère espagnole. L’abstraction côtoie le figuratif, et ailleurs le visuel oscille sur le seuil du visible et de l’invisible : l’œuvre accouche par une suite de vagues dans lesquelles les images se dérobent et se dévoilent tour à tour – on décèle le contour d’une main là, ici d’une page, et puis tout est de nouveau englouti dans la mauve mélancolie. À travers cette attitude pudique d’amoureuse, Camille Benarab-Lopez se montre en se cachant dans les feuilletés de signes qu’elle compose.
(...)
Issue d’une double famille d’immigrés quasi analphabètes aux modestes reliques photographiques, le travail de l’artiste en lui-même témoigne d’un écart – gouffre autant qu’ascension – et à l’amour des images s’ajoute une tendresse pour les livres : elle se perçoit dans la caresse d’un doigt sur une page, sur un ex-voto via l’empreinte d’un ouvrage. Alors que les peines perdues affleurent, la sensualité nous effleure dans ce ballet de mains qui réunissent les mondes – la main savante se lie à celles s’appliquant du henné, empoignant l’hétérogénéité des formes.
(…)
Chez elle, les jeux de transparence obscurcissent, et l’artiste souligne que la vérité se dépose plutôt dans l’eau trouble que la clarté cristalline. Les images, matières et mémoire, sont alors autant de peines perdues pour enrubaner les brisures, habiter les manques et recomposer l’Image – cette Image complète, puzzle où tout s’assemble proprement, joliment, mais qui dans la vie demeure toujours absente, comme l’écrit Joyce Carol Oates (Blonde, 1999). Pour répondre à l’absence, Camille Benarab-Lopez rétorque que l’image ne peut être que des images, que l’une glisse toujours, continuellement, sur une autre. Oui : le fond de l’image est toujours une image, à l’infini comme peuvent l’être les peines, et un doux mystère, quant à lui, perdure.
Ysé Sorel
Alphabet “scars”
- création d’un alphabet en céramique émaillée
- & scannée
- 2024
“Si nous percevions l’alphabet comme une série d’incisions, nous ne pourrions pas lire. (...)
Je prends un café au soleil, sur la place Exarcheia. Je vois passer un camion de déménagement. Les inscriptions en alphabet grec pennent sens pour la première fois à mes yeux : “métaphore”. Transport.
La métaphore est le transport d’une signification d’un lieu vers un autre.”
Un appartement sur Uranus
Paul B. Preciado
Ce qui s’écoule
- projet en collaboration avec Anna Ternon
- résidence au Centre Tignous d’art contemporain
- de Montreuil
- 2024
© Grégory Copitet
La seconde collaboration de Camille Benarab-Lopez et Anna Ternon peut s’entendre comme la proposition d’élaborer une réflexion commune autour de nos usages de l’eau et des imaginaires qui lui sont liés, afin de sonder cette matière qui s’écoule tout autour et à l’intérieur de nous. Dans ce cadre, les deux artistes ont proposé à différents groupes d’habitant.e.s de la ville de Montreuil de s’interroger sur leurs usages de l’eau, questionnant ainsi la diversité sociale, culturelle et générationnelle des pratiques. Depuis ces expérimentations et récits rassemblés, les deux artistes tentent de mettre en lumière notre rapport à cette matière qui tend à nous échapper tout en étant au centre de nos vécus.
Les artistes remercient toutes les personnes
qui ont contribué à l’élaboration et la réalisation de cette exposition :
> tous.tes les membres de l’équipe du Centre Tignous d’art contemporain de Montreuil ;
> Izoé Poulain ;
> Virginie Traoré-Honoré et les élèves de sa classe de CE2-CM1 de l’école élémentaire Diderot 2 : Alma, Assma, Ayssar, Chigozie, Dalil, Eliah, Juneyd, Luca, Mariam,
Mateï, Nana, Nima, Olympe, Rayane, Robin, Uma ;
Vanessa Lahiani, Mehtap, Marie et Raymonde de la résidence autonomie des Ramenas ;
> Alexis Küppers et les apprenant.e.s du cours de Français Langue Étrangère : Walaa, Poolan, Ichrak, Nabila, Asma, Saliha, Nana, Maria, Juan Carlos, Tlaymass, Abigait Jezabel, Mansi Roma, Miriam, Nabila, Kadiraly, Anthonia, Hamida, Khadija, Maria ;
> ainsi qu'Anthony Meslé-Carole, chargé de mission plantation à la Ville de Montreuil.
Les dessins sur plâtre, ainsi que l'ensemble des textes sont issus d'ateliers et d'entretiens réalisés avec les personnes précédemment citées. Nous tenons à les remercier une nouvelle fois pour leurs témoignages et leur confiance.
Les jours avenir
- exposition personnelle
- Salon a ppr oc he, le Molière, Paris
- cur.: Emlilia Genuardi
- avec le soutien du CNAP
- 2021
© Benoît Blanchard et Grégory Copitet
Camille Benarab-Lopez développe une pratique de l’assemblage agile dans lequel elle multiplie les strates tant temporelles qu’intimes, factuelles et réminiscentes.
Ses œuvres sculpturales empruntent aux objets quotidiens leur fonction support et leur stabilité – table, paravent, étagères – pour y adjoindre une multitude d’objets et de matières accueillant des images transférées. Se côtoient ainsi le plâtre, le verre, le tissu, l’acier, toutes porteuses d’une image surfacée qui narrent ensemble un discours polyphonique, presque hors du temps et volontiers insaisissable. Ces images proviennent de multiples sources, le plus souvent personnelles, mais par-delà l’anecdote qu’elles portent en propre c’est l’immensité de toutes les histoires qui s’y retrouve. Une fleur porte en elle toutes les fleurs: une photo de famille rejoue toutes les photos de famille, tous les albums, toutes les lectures, tous les regards.
En cela, par la quiétude qu’elles dégagent, leur familiarité, le sentiment d’un tendre « déjà vu », les œuvres que Camille Benarab-Lopez présente créent un sursaut à l’esprit de l’observateur, une amorce, un frisson, un ressaisissement du souvenir.
Benoît Blanchard et Sarah Mercadante
Catalogue de l'exposition Fantôme volet 3
Signes et outils
- série de céramiques émaillées
- en partie d’après L’homme et ses signes,
- d’Adrian Frutiger (1983)
- dimensions variables
- 2022 -
Voir venir
- exposition personnelle
- Poush Manifesto, Clichy
- chez Nanoville sur une invitation de A-topos'
- 2022
- “(...)
- Ou plutôt un grand livre d’images, des scènes, des images qui tracent les contours d’activités au quotidien, des activités de routine, toujours les mêmes, ou presque, dans un lieu, toujours le même, ou presque.
(...)
On ne voit presque rien, une main qui tient le manche d’une casserole ordinaire, une gazinière dont on ne voit que l’angle, ancien, démodé. Ou encore les pieds nus de femmes assisses dont on n’aperçoit que le bas des jupons longs et colorés, qui frôlent les chevilles.
(...)
Des images, comme autant de petits trésors que l’artiste récolte et recueille, qu’elle s’approprie, qu’elle détourne, qu’elle reformule en cadrant et en recadrant. De ces images, au-delà des sujets fragmentés que l’on capte sans presque les voir, sans saisir leur totalité, qui toujours nous échappe, on saisit un hors cadre, un hors champ qui nous dit que l’histoire, que les histoires continuent et franchissent les limites matérielles et leurs représentations.”
- Gaia Goldcymer
- Catalogue d’exposition